Musique

Quintet : Restitution Publique

Une Création Artistique Par Cinq Ados Extra-ordinaires !

mercredi 7 juin 2023

La Carène • Brest

Musique et danse

Quintet est une création en danse contemporaine et en musiques électroniques par les jeunes du SESSAD Autisme (Services d’Education Spéciale et de Soins A Domicile) accompagnés par Maxime Dangles et Caroline Denos.

« Quintet », une création artistique par cinq adolescents porteurs d’autisme

Fidèle à sa volonté d’ouverture pour tous les publics, la Carène continue de tisser de beaux liens avec le SESSAD Autisme. Depuis septembre 2022, cinq jeunes du SESSAD âgés de 14 à 17 ans se sont lancés dans un projet de création entre musique et danse, autour des artistes Maxime Dangles et Caroline Denos. Baptisé « Quintet », ce projet donnera lieu à une performance le 5 juin prochain. Regards croisés entre artistes et soignants sur cette immersion pas banale dans le spectacle vivant.

Le SESSAD Autisme : pouvez-vous nous parler de la mission de ce centre médicosocial du CHRU de Brest ?

Lénaïg Hamon (éducatrice) : Le SESSAD* accueille à ce jour 46 enfants atteints de TSA (Troubles du Spectre de l’Autisme). On intervient dans le lieu de vie de l’enfant, mais aussi à l’école ou dans le cadre de ses loisirs. Le diagnostic est établi à l’âge scolaire, les enseignants ou pédiatres repèrent des difficultés dans le comportement social, des difficultés à communiquer et à verbaliser. Au SESSAD, une équipe pluridisciplinaire

accompagne ces enfants : éducateurs, psychomotriciens, orthophonistes, neuropsychologues, pédopsychiatre… Les interventions sont coordonnées pour soutenir au mieux les jeunes et les familles.

D’où vient l’idée de ce projet artistique mêlant danse et musique en partenariat avec la Carène sur toute une année ?

Lénaïg Hamon : Tout d’abord, il y a déjà une bonne collaboration entre le SESSAD et la Carène. On a déjà travaillé ensemble plusieurs fois. L’équipe de l’action culturelle de la Carène connaît bien le public qu’on accueille, ça facilite les échanges. Et bien sûr, ça correspond avec le projet du SESSAD d’amener les enfants vers l’extérieur, vers les lieux de droit commun. Les parents ont parfois essuyé de nombreux échecs dans différentes structures. Ils peuvent avoir peur d’emmener leurs enfants dans tout ce qui est culturel,

ils se mettent des barrières…

Hélène Bargain (psychomotricienne) : On voit que ces jeunes sous-estiment leurs capacités, ils n’ont pas l’habitude d’être valorisés dans ce domaine-là, ils ne cherchent pas spontanément à l’explorer. D’où l’importance de proposer ce genre de projet.

Quel est justement votre constat à mi-parcours ? Quels éventuels changements pouvez-vous observer ?

Lénaïg Hamon : L’estime de soi, c’est évident ! Ils sont arrivés un peu figés, ils ne savaient pas où ils allaient. Au fur et à mesure, on les a vus communiquer entre eux. Pour nous ce genre de choses, c’est super ! Ils font groupe ! Et ça, ce n’était pas gagné car d’ordinaire ils n’appartiennent à aucun groupe. Ça permet aussi de diversifier leurs centres d’intérêt.

Hélène Bargain : Ce sont des jeunes qui ne sortent pas beaucoup, qui n’ont pas beaucoup de copains. Et ça reste des ados, donc ils sont beaucoup sur les écrans, les jeux vidéos…

Pour ces ateliers, on remarque qu’ils sont contents de venir. Il y a une grosse motivation ! C’est un projet assez global, il y a le côté danse et musique, mais pour eux, le fait de faire ça sur une année, d’avoir différents temps à la Carène, de voir des gens différents, c’est vraiment quelque chose d’hyper riche. Ils apprennent pleins de choses, ils grandissent !

A quelle fréquence se déroulent ces ateliers ?

Caroline Denos (danseuse) : Pour ma part, on se rencontre à peu près chaque semaine à la Carène depuis septembre, et une fois par mois avec le musicien Maxime Dangles. Aux dernières vacances, nous avons fait une résidence de plusieurs jours à la MPT de l’Harteloire. Une autre sera programmée aux vacances de printemps.

Hélène Bargain : Nous avons aussi fait une visite de la Carène en octobre avec les techniciens. Les jeunes ont pu découvrir les différents métiers du spectacle. On a été très bien accueillis ! Ils ont aussi été invités à voir le concert d’Izia en décembre.

D’un point de vue artistique, comment se passent les séances ?

Caroline Denos : Il y a beaucoup de liberté dans cet atelier. Leurs stéréotypies (tendances à répéter les gestes ou paroles) peuvent devenir quelque chose d’intéressant à valoriser dans leurs mouvements ou dans la manière d’utiliser les instruments de musique, le Kraken (système de petits boîtiers qui permettent d’intervenir sur le son). Ce qui peut-être à canaliser dans une vie sociale, ou dans la relation avec les autres, devient finalement un élément créatif. On est dans le processus artistique : transformer et donner une autre valeur. Dans un autre contexte ce serait déplacé ou mal adapté, là ils peuvent s’autoriser des choses (et malgré tout, on ne les laisse pas déborder). Ils ont ainsi moins d’appréhensions et osent s’exprimer. C’est quelque chose de progressif.

Lénaïg Hamon : Tout est complémentaire. Nous, on n’a pas cette formation-là. C’est super pour nous de pouvoir intégrer ce type de projet parce que on ne pourrait pas faire ça sans Maxime et Caroline.

Comment faites-vous pour mettre les jeunes à l’aise ?

Caroline Denos : Des petits exercices… On plaisante aussi. Touts les choses sont dédramatisées. Et le fait que rien ne soit obligatoire, ils ont toujours la possibilité d’observer. Après, on va les chercher, les accompagner dans l’exercice. La communication entre nous est facile, les jeunes sont pris dans les discussions, on leur demande leur avis tout le temps. Et ce qui est bien c’est qu’Hélène et Lénaïg sont aussi actrices pour les aider, elles ne sont pas en retrait.

Le projet « Quintet » s’inspire de la Danse des Cinq Rythmes de Gabriel Roth (danseuse américaine, 1941-2012). En quoi consiste-t-elle ?

Caroline Denos : C’est une danse très libre où l’on passe par différentes énergies en cinq temps : on démarre avec le Fluide, on traverse le Staccato, le Chaos et le Lyrique avant de revenir à la Quiétude, le retour au calme. Musicalement c’était aussi intéressant de se saisir de ça pour Maxime Dangles. Chacun peut incarner une énergie dans laquelle il se sent… C’est un des fils conducteurs de cette création.

Après le spectacle final prévu le 7 juin, quelle suite ?

Lénaïg Hamon : On aimerait renouveler l’expérience. Tout le monde trouve que c’est super positif. Un jeune nous a même dit : « je veux revenir l’année prochaine »…

* Services d’Education Spéciale et de Soins A Domicile